jeudi 20 juin 2013

12000 milles nautiques, 52 équipiers


La Trinité - Lisbonne: Thibaud Hirsch-Gerdolle, Etienne Laurent,
Louis de Gromard & Grégoire Mouly 
Parti de la Trinité le 26 septembre 2012 et revenu à bon port le 14 juin 2013 Alfred est au port de la Trinité et se repose d’un long voyage de neuf mois pendant lequel il aura pris la mer 165 jours pour parcourir 11835 milles en route directe. Nous voulons remercier particulièrement chacun de nos 52 équipiers qui se sont succédés à bord et sans lesquels nous n’aurions pas pu faire ce périple. Au total, nous avons eu la joie d’accueillir à bord 19 équipages différents: la diversité des équipages ainsi que la grande variété des zones et des conditions de navigation, entre les grandes traversées et les périodes de cabotage, ont fait que cette année est passée à toute vitesse, comme un rêve!

Lisbonne - Madère : Thomas Noguès, Mathilde Chevillotte
& Paul Laurent

 Chaque équipage a été exceptionnel. Est-il possible de définir un profil type de l’«équipier d’Alfred»? Peut-on comparer de longues périodes de navigation hauturière et le ‘pigouillage’ entre les îles où le principal souci est de trouver où l’on va se baigner ou pêcher la langouste? 


Madère - Les Canaries : Gérard de la Cochetière, Yves Trassard
& Denys Blondiaux
Les équipiers d’Alfred sont répartis de façon quasiment égale entre la famille et les amis: 25 amis et 27 membres de la famille; parmi ces derniers, nous avons eu le bonheur de voir à bord 11 de nos enfants et petits-enfants et 16 de nos frères et sœurs et cousins-cousines nous ont fait le plaisir de nous rejoindre.

Les Canaries - Îles du Cap Vert : Gérard de la Cochetière,
Yves Trassard, Deny Blondiaux & Louis de Gromard.
 
 
L’âge moyen des équipiers d’Alfred est 50 ans, allant de 3 ans (Charlie et Alexandre) à un joyeux quarteron de futurs septuagénaires, bon-pied bon-œil, démontrant si c’était nécessaire que l’on pourra encore longtemps naviguer sur la mer jolie en bonne compagnie.
 

Transat-aller, Cap Vert - Barbade - Grenadines - Saint Vincent - Sainte Lucie - Martinique :
Pierre Laurent, Thibaud Hirsch-Gerdolle & Louis de Gromard
«Côté jeunes filles, c’était pas mal!» comme dit la chanson des Frères Jacques. A bien considérer, il reste tout de même une marge de progrès, car Alfred a accueilli deux fois plus d’hommes que de femmes (34 contre 18). Disons et répétons que les femmes et les jeunes filles sont espérées et seront toujours bien accueillies à bord d’Alfred.

Croisière de Noël à la Martinique : Etienne's family;
Etienne, Eléa, Marie et Charlie Laurent
accompagnés de Louis de Gromard


Martinique, Dominique, Guadeloupe : Brigitte Caron,
 Isabelle & Daniel de Gromard et Henriette Dupont


Peut-on comparer le plaisir de naviguer de Louis, qui a parcouru 4280 milles à bord et nous l’en remercions, et celui d’Anne qui aura tiré quelques bords sur 45 milles, entre Faial, Pico et São Jorge aux Açores? Pour chacun, notre joie et notre reconnaissance de les accueillir étaient les mêmes et nous espérons vivement que chacun de nos équipiers aura envie de revenir, pour goûter à la navigation hauturière pour ceux qui n’ont pas encore partagé cette belle expérience, ou re-goûter à ce que nous avons désormais tous en commun: le ty-punch façon Alfred!
 
Guadeloupe, Antigua, Saint-Barth, Saint-Martin :
Gisèle de Meillac, Hélène et Benoît Lizée.
Alfred
Une grande qualité d’Alfred est son bon comportement dans la mer du large. Bien qu’il soit dériveur, la largeur importante du bateau (4,20m) lui donne une grand stabilité de forme qui le rend très raide à la toile et confortable dans la mer bien formée. Les équipiers ont apprécié le comportement du bateau lors des longs bords de vent arrière sous génois tangonné, près de 1800 milles lors de la transat-aller et près de 800 milles entre les Açores et la Bretagne, où l’on pouvait en toute sécurité garder toute la toile jusqu’à 25 nœuds de vent! En revanche, nous étions un peu à la peine quand il fallait marcher au près, ce qui est arrivé pendant pratiquement toute la transat-retour, des Bahamas aux Açores; cependant, malgré le mauvais près à 50°-55° du vent, nous avons tenu une moyenne de 4,5 nœuds sur la route directe, ce qui est tout de même ‘pas si pire’ …
Croisière aux Îles Vierges Britanniques :
 Hélène et Antoine Arlet, Claire et François Mouly
Mais le dériveur était assurément le bateau idéal pour le parcours que nous avons suivi, en particulier sur les côtes de Cuba où l’hydrographie est incertaine et où il est nécessaire de se hasarder dans de très petits fonds: la dérive joue alors le rôle de sondeur et c’est bien utile!
A part les quelques pépins de barre et de pilote, le matériel a pas mal tenu. Nous nous félicitons de la qualité des voiles et du gréement, restés impeccables pendant cette année, mais nous nous souviendrons pour l’avenir d’avoir des pilotes automatiques plus fiables pour les navigations futures.

BVI - Jamaïque - Cuba : Loïc Jomier, Sabine et Yves Chevillotte
Bilan de la croisière
Notre idée de départ était de faire le tour de Cuba et notre parcours a été magnifique. Notre autre idée était de faire ce parcours avec des équipages familiaux et d’amis qui voudraient bien nous rejoindre sur notre parcours. Tout cela s’est magnifiquement accompli, sans aucun grain de sable majeur. Nous sommes très heureux de ces choix mais nous nous disons tout de même que cet itinéraire était un peu trop ambitieux, surtout en considérant les courtes jambes d’Alfred, et que, s’il y a une prochaine fois, nous essayerons de faire un itinéraire plus court qui permette des escales plus longues.


Cuba, croisière dans l'archipel de los Canarreos : Emmanuel's family,
Caroline, Clémentine, Emmanuel, Alexandre et Pauline.

Cuba, croisière aux Jardins de la Reine : François de la Vigne,
Sophie et François Biette & Isabeau d'Abzac
La cuisine à bord
Grâce aux bons soins de Catherine, la cambuse d’Alfred a été magnifiquement préparée; les conserves de plats cuisinés nous aurons accompagnés jusqu’à la fin et nous nous félicitons de la qualité et de la diversité du choix disponible.
Parmi les succès de la table d’Alfred, nous retiendrons deux vedettes :
Le pain fait à bord, la fameuse recette du Pão do Porto Santo, communiquée par Caroline notre belle-fille (voir la recette ci-dessous) et pratiquée par les boulangers du bord avec un succès toujours renouvelé.
Un légume roi, le chou. On le trouve partout et il permet de faire des salades très fraîches et savoureuses après quinze jours de mer: l’arme absolue contre le scorbut!
 

Tour de Cuba, de Cienfuegos à La Havane : Georges Bitterlin,
Philippe d'Entremont, Jean-Louis Porchier, Louis Fustier.
La recette du Pão do Porto Santo
Cette recette très confidentielle d’un pain cuit à la poêle est un secret partagé désormais par la confrérie des équipiers d’Alfred.
Ingrédients: 1 sachet de levure de boulanger, 1 cuiller à café de sucre, 500g de farine, 1/3 de litre d’eau de mer.
Outillage: Un grand bol rond, une sauteuse à larges bords et couvercle, une cuiller en bois, une spatule souple.
  1. Réveiller la levure: Mélanger la levure et le sucre en poudre dans un bol, ajouter un peu d’eau tiède. La levure commence à ‘’mousser’’, elle se ‘’réveille’’. Pendant ce temps, faire tiédir l’eau de mer.
  2. Mettre la farine dans le bol, ajouter la levure et mélanger. Ajouter progressivement l’eau de mer tiède en mélangeant bien pour faire disparaître les grumeaux et obtenir une texture pâteuse relativement liquide, ayant une consistance à mi-chemin entre le fromage blanc et la mayonnaise. Pétrir la pâte pendant une dizaine de minute pour l’aérer.
  3. Laisser lever la pâte entre ½ heure et ¾ d’heure dans le bol en le couvrant d’un torchon.
  4. Préparer la sauteuse en mettant une bonne couche de farine sur toute la surface (c’est très important pour que cela n’attache pas pendant la cuisson). Faire descendre en douceur la pâte levée dans la sauteuse à l’aide de la spatule; ne pas la bousculer pour qu’elle ne s’effondre pas comme un soufflet!
  5. Faire cuire la pâte à feu minimal pendant au moins ¾ d’heure en la couvrant; entrouvrir le couvercle pour laisser sortir la vapeur. Le pain à demi cuit doit bien se décoller des parois de la sauteuse.
  6. Sortir le pain à demi cuit, remettre une bonne couche de farine au fond de la sauteuse et retourner le pain pour faire cuire l’autre face pendant ½ heure à ¾ d’heures.
  7. Sortir le pain de la sauteuse; il doit ‘‘sonner creux’’.
  8. Choisir un bon fromage bien franchouillard, déboucher une bonne bouteille et déguster entre amis en pensant à Alfred.


Cuba - Bahamas : Louis Fustier, Jean-Louis Porchier,
Georges Bitterlin et Daniel Laurent.
L’énergie à bord
L’énergie à bord est restée un problème délicat pendant tout le voyage. L’éolienne et le panneau solaire de 100 W étaient bien adaptés; il manquait cependant une hydrolienne, véritablement complémentaire des deux précédents. En revanche, le parc de batteries était notoirement insuffisant: la capacité des batteries de service était de 210 AH, il faudrait pratiquement la doubler.

Bahamas - Bermudes : Marc Levêque, Jean-François et Daniel Laurent

Les communications
Nous remercions Yves et Sabine de nous avoir prêté leur poste Iridium qui nous a permis de recevoir, avec un succès variable, les prévisions météo pendant ce voyage. Ce système de communication par satellite s’est montré cependant peu fiable, et nous sommes restés sans moyens de communication pendant 8 jours après le départ des Bermudes vers les Açores. Dans l’avenir, nous veillerons à avoir un moyen complémentaire plus rustique (BLU?) pour assurer un minimum de fiabilité des communications.

Transat Bermudes-Açores : Thierry Chazalon, Michel de Saint-Remy
& Jean-François Laurent.

L’itinéraire d’Alfred
Nous l’avons dit, cet itinéraire était trop ambitieux pour un voyage de neuf mois et il aurait été sage de le faire plus court. Le contournement de Cuba allonge d’au moins un quart, voire un tiers, la navigation pratiquée par la majorité des bateaux : le tour de l’Atlantique avec retour à partir de Saint-Martin. Les deux mois passés à Cuba ont été fantastiques et nous conservons une vraie nostalgie de la gentillesse des Cubains et de la découverte de ces archipels sauvages et déserts qui entourent la grande île.
1ère croisière aux Açores, Faial, Pico, Sao Jorge :
Anne Fontanet, Thierry Chazalon, Michel de Saint Remy
Le voyage nous a également réservé quelques surprises aussi bonnes qu’inattendues : les Bahamas, que nous imaginions une ’Riviera’ archi-friquée et bordée d’immeubles immenses et impersonnels, sont restés très authentiques et variés. Les Bermudes, so perfect, so picturesque, so british, nous ont ravis.
Nous avons une vraie nostalgie des Îles du Cap Vert dont nous n’avons connu que les îles de São Vicente et de Santo Antão. Nous y retournerons…
 
2ème croisière aux Açores, Terceira, Sao Miguel : Caroline et Jérôme Cabri
Le prochain voyage?
Alfred est un bon bateau et il aura envie de reprendre le large. Le Brésil n’est-il pas une destination attrayante et un excellent prétexte pour repasser au Cap Vert ou nous devons retourner? Plus proche de nous, le tour de la Méditerranée, que l’on peut pousser jusqu’à la Mer Noire, ne constitue-t-il pas non plus un joli thème pour s’évader et y accueillir ses amis?


Açores - Bretagne : Antoine George, François Mouly,
Jean-Luc Arlet et Jean-François Corbineau.

Chanson d’Antoine George – Sur l’air de ‘Milord’ d’Edith Piaf
 
Refrain
Allez venez, amis, embarquez sur Alfred
Et trouvez la relève aux plus fous de vos rêves!
Vous voulez Baléares? Vous voulez Zanzibar?
Afrique ou Amérique? Explorez-en les criques!
1er couplet
Souvent, vous vous disiez: «Je devrais m’en aller,
«Larguer le quotidien, faire place à l’aventure,
«Et comme un albatros planer sur les nuées,
«Prendre de la hauteur, et enfin m’retrouver!»
Venez, c’est le moment, jouez contre-courant!
Placez tout sur Alfred et finissez gagnant!
les couplets suivants sont en attente d'auteurs
avis aux amateurs
 

Notre-Dame de Bon Port, la Sainte Patronne de notre paroisse de Nantes, nous a accompagnés pendant tout ce périple et continue de veiller sur Alfred et ses équipages. Nous lui manifestons notre reconnaissance en la plaçant en point final de ce blog.

 
  
 
  
  
 
 
 
  
 



samedi 15 juin 2013

Cap sur la Trin’ - Ça sent l’écurie !

Plaça da Republica: les portes de la ville de Ponta Delgada
Fenêtre néo-manueline

Mardi 4 juin, au  lendemain de leur arrivée, Jean-Luc, François et Antoine font une brève visite de Ponta Delgada. La marina est très bien équipée et en plein centre-ville, ce qui est bien commode pour ce tourisme rapide et les petites emplettes. Pendant ce temps, Dominique et Jean-François, qui connait bien Ponta Delgada pour y être venu en vacances l’année dernière, vont faire les dernières courses de fruits et légumes chez Continente, la grande chaîne d’hypermarchés portugais.
 
Balcon d'un palais de Ponta Delgada
Calçadas des trottoirs de la rue
Sous-bois au bord du lac de Furnas

Nous désirons profiter de notre petite voiture pour faire une visite rapide de l’île en repassant sur les lieux visités il y a deux jours avec Caroline et Jérôme. Malheureusement le temps est affreux : un lourd crachin bien mouillant et opaque couvre complètement São Miguel, nous cachant les magnifiques paysages de l’île. Nous apprécions néanmoins la visite du parc botanique de Furnas, planté au 19ème  par le consul de Grande-Bretagne autour de sa résidence et devenu magnifique, avec son grand bassin d’eau volcanique chaude bordé d’araucarias somptueux, ses rivières et ses jardins clos remplis de fleurs et de fougères arborescentes et ses grandes allées de Gingko biloba (le seul arbre qui, dit-on,  ait résisté à Hiroshima).


Allée de Gingko Biloba du jardin botanique de Furnas
Fougères arborescentes
La végétation luxuriante du jardin de Furnas
Avant de rentrer et malgré le temps couvert, nous tentons notre chance au sommet du volcan des Sept Cités pour tenter de saisir l’admirable vue sur les deux lacs, Lagoa Verde et Lagoa Azul : Le temps est complétement bouché et nous ne voyons rien… Nous trompons notre déception en allant visiter un lieu étrange : les vestiges du palace cinq étoiles construit sur ce promontoire pour de riches clients attirés par cette admirable vue. Il faut croire que cette vue se montre rarement car le prestigieux hôtel ‘Monte Palace’  a fait faillite aussitôt construit pour agoniser lamentablement sous les coups des vandales : il en reste un lieu étrange et inquiétant qui pourrait être le lieu de tournage d’un thriller… Nous nous remettons de cette atmosphère ‘gore’ et nous consolons de cette purée de pois en allant le soir, invités par nos nouveaux équipiers, dîner dans un bon resto de Ponta Delgada et profiter une dernière fois de la gastronomie portugaise.

L'hotel 5 étoiles Monte Palace, un lieu glauque....

... et dévasté...

Situation météo au moment du départ.
 


L'équipage au départ de Ponta Delgada
Départ le lendemain mercredi vers midi, par un temps splendide et un vent de NNE qui nous déhale le long de la côte sud de São Miguel pendant l’après-midi. Nous sortons du fetch de l’île au milieu de l’après-midi et faisons route tranquillement au près tribord amures au 070° vers La Trinité située à 1170 milles au 050°.
Dernière vue de Sao Miguel


Antoine et Jean-François: cap sur la Bretagne!
 

François à la barre d'Alfred

Les quarts s’installent dès la première nuit tels qu’ils resteront pendant toute la traversée, François prenant le premier quart de 22h à minuit, puis Antoine de minuit à 2h, Dominique de 2 à 4, Jean-François de 4 à 6 et Jean-Luc de 6 à 8. Pendant la journée du jeudi 6 juin, nous faisons deux belles rencontres ; c’est d’abord un groupe de trois baleines magnifiques, probablement des baleines bleues, dont nous voyons longuement et distinctement les dos et les souffles et que nous arrivons à approcher à  100 mètres. Dans l’après-midi, nous croisons un navigateur solitaire en route vers les Açores qui a l’air d’avoir besoin de compagnie et se montre très bavard sur la VHF ; il navigue sur Roma, une jonque improbable à deux mats, et nous nous détournons pour le croiser à 20 mètres et lui adresser un salut fraternel !
Baleine bleue perdue sur fond bleu.
Navigateur solitaire sur sa jonque

Le vent reste établi entre le NNE et le NNW pendant les trois premiers jours, du jeudi 6 au samedi 8 juin, nous permettant de suivre une route passant progressivement du 90° au 60°, ce qui nous éloigne un peu de la route directe. Dès le début de la traversée, Emmanuel nous envoie tous les jours un routing et une description générale de la situation météorologique. Nous complétons ces informations par les fichiers Grib qui nous donnent l’évolution du vent localement, sur la route prévue d’Alfred sur 72 heures, grâce à l’Iridium qui, sentant la fin du périple, est d’humeur coopérante. Emmanuel nous annonce le passage d’une dépression qui, après les trois premiers jours, devrait nous donner une bonne brise de Suroît qui devrait nous accompagner pratiquement jusqu’à la Bretagne.

Antoine
 
Dominique
Jean-Luc plongé dans sa lecture.


Jean-François
Extrait du journal de bord du 9 juin: La Trinité, 769 milles
 
Ses prévisions se réalisent avec une exactitude quasi-parfaite : dans l’après-midi du dimanche 9 juin, alors que nous sommes à 700 milles de la Trinité et à la latitude du milieu du Portugal, le vent passe à l’WSW puis au SW, nous permettant d’établir le génois tangonné, grand-voile bâbord amures. Le lendemain lundi, le vent passe au SSW en forcissant jusqu’à force 6. La mer reste très praticable et Alfred fait bonne route au 30°, ce qui nous permet de revenir sur la route directe.

François au quart de nuit ...

... et François au quart de jour.
Position le 9 juin
A partir du lundi 10 juin, à la moitié du trajet, nous observons successivement les passages de deux dépressions secondaires annoncées par Emmanuel, qui entretiendront le flux de secteur SW pratiquement jusqu’à l’arrivée. La première de ces dépressions nous dépasse le mardi, le vent passant au SSW avant de revenir à l’WSW pendant la journée du lendemain. Alfred gagne sur la route directe plein vent-arrière en suivant le vent et sans toucher aux écoutes, à la cadence de 140 milles par jour.

Comment piloter un poids lourd de 10 tonnes lancé par force 7!
 
Réception du routing de Manolo et du fichier météo par l'Iridium.
Une deuxième dépression secondaire, plus costaude, nous touche presque aussitôt, nous apportant une brise de SW assez forte, de force 7, pendant toute la journée du mercredi 12 juin. Sous grand-voile réduite à un ris et génois n°2 tangonné, Alfred avale sans coup férir la route  au rythme de 160 milles par jour.
Jean-Luc imperturbable dans le baston
Relève de barre par Antoine.
Cours de navigation astronomique.

La route maritime des cargos, de la pointe de Bretagne à la Galice, est franchie dans la nuit du mercredi au jeudi alors que le vent tourne progressivement à l’Ouest en restant soutenu mais permettant de renvoyer toute la toile. Le trafic est incroyablement dense et nous voyons jusqu’à 30 navires simultanément sur l’AIS. Alfred arrive néanmoins à se faufiler au travers du rail montant mais bute sur le passage du rail descendant : il nous faut manœuvrer in extremis pour le Seago Piraeus, un porte conteneur de 300m qui passe dans la nuit à moins de 1000 m d’Alfred : vu de près, c’est un beau morceau !


Décidément, les thons du golfe de Gascogne ne sont pas dignes
de cette fine canne qu'est Antoine. Dommage, tant pis pour eux !
Jeudi 13 juin à midi, nous ne sommes plus qu’à 140 milles de La Trinité et un grand soleil nous accueille dans le Golfe de Gascogne ; pendant qu’Alfred, sentant l’écurie, avance tout seul vers Belle-Île, Antoine se lance dans le ‘’mitonnage’’ d’un clafouti aux pruneaux : un triomphe acclamé par l’équipage ! Un équipage pourtant devenu difficile en raison de la qualité de l’ordinaire, rehaussé par les fromages de qualité, les jambons de terroir et autres saucissons de derrière les fagots, les chocolats fins, sans parler des vins… dont la cambuse avait été largement provisionnés par des équipiers ‘fines gueules’…

Jean-François et François s'étripent au Scrabble.
Ca commence à sentir la Bretagne!

Le triomphe modeste de Mister Clafouti !


Comme s’il hésitait à rentrer trop vite au port après ce périple de neuf mois autour de l’Atlantique, Alfred ralentit l’allure et, accompagné par un banc de dauphins qui jouent autour de lui, se traîne paresseusement vers la Baie de Quiberon dans la brise mollissante du soir de ce 13 juin; il est heureux de rentrer mais ne peut s’empêcher de regarder en arrière avec nostalgie … vers Lisbonne … vers São Vicente …. vers la Barbade … vers la Martinique … vers Cuba … vers les Bermudes …. Dis ! Quand est-ce qu’on y retourne ?

 
L'accueil des dauphins du golfe de Gascogne
 
 
L"équipage à l'arrivée au ponton de la Trinité, vendredi 14 juin à 18 heures.