mercredi 21 février 2024

La « Transat des Cousins » Cap Vert - Martinique

 

L'équipage avant l'appareillage de Mindelo

Dimanche 28 janvier, au ponton de la Marina Mindelo à São Vicente, Alfred frétille d’impatience avant de partir pour sa cinquième transat, du Cap Vert à la Martinique : après une période de quatre jours d’harmatan qui a apporté du sable du Sahara, bouchant l’horizon et empêchant les avions de se poser sur l’aéroport Cesaria Evora, l’alizé s’est enfin levé, régulier à 15-20 nœuds, un appel au large. Après cette incertitude sur les vols, nos équipiers de l’étape Sénégal-Cap Vert nous ont quittés la veille et Catherine rejoint à son tour son vol vers Nantes (qui ne se passera pas sans de multiples péripéties : deux nuits passées successivement dans les aéroports de Lisbonne et Madrid !). Avant de partir, Catherine nous a constitué un approvisionnement superbe de vivres frais, les pleins sont faits et, mise à part l’inquiétude sur l’état du moteur, Alfred est prêt pour la traversée.

Escale forcée avant de rallier le Cap Vert, mais bien agréable à Lisbonne...

... visite culturelle...

..... la "tentation de Saint Antoine" de Jérôme Bosch au Musée des Arts Antiques...

... et fin de soirée à la Casa Sines au Bairro Alto.

Nos équipiers, Benjamin, Baptiste, Adrien et Xavier arrivent à bord dimanche en début d’après-midi, ils ont croisé sans la voir Catherine à l’aéroport : un équipage jeune et de choc pour cette transat. Benjamin, notre dernier fils, est accompagné de deux cousins germains, Baptiste Laurent et Adrien de Gromard, ainsi que de Xavier Arlet, son cousin issu de germain. Ils ont eu du mal à rejoindre le bord à cause des difficultés des vols, ont erré deux jours à Lisbonne et sont contents d’arriver enfin ; ils n’auront malheureusement pas le temps de faire avant l’appareillage la balade qu’ils projetaient à São Antao. Mais ils sont enthousiastes, prêts à apprendre que naviguer est aussi vital que respirer ! Nous passons une délicieuse dernière soirée capverdienne dans l’ambiance tropicale d’une terrasse de Mindelo égayée par des musiciens de rue.

Le marché aux poissons à Mindelo

L'arrivée des pêcheurs.

Une dernière petite bière à la plage de São Pedro


Larguez les amarres!!

La suite de la relation est faite des messages envoyés quotidiennement à 12h TU à Emmanuel qui nous suit depuis Paris, nous renvoie une description météo de notre traversée et transmet nos nouvelles à nos proches.

Mardi 30 janvier. « Bonjour à tous, nous avons quitté la baie de Mindelo hier à midi par belle brise de NE et avançons assez vite. Après avoir été retardés dans l'après-midi par la dévente du fetch de São Antao, nous avons retrouvé avant la nuit l'alizé à 25 milles sous le vent de cette dernière île du Cap Vert et, depuis, nous marchons à plus de 7 nœuds vers la Martinique. Il fait un temps superbe et le vent se maintient à 20-25 nœuds, grand-voile haute et génois. Distance Martinique 1936 milles. Moral au beau fixe après une journée d'accoutumance des estomacs. Très bon déjeuner à midi, poulet curry et aubergines, papaye ; super dîner le soir, apéro-ginginha, steak de thon, riz salade. Pendant que le capitaine dort sur ses deux oreilles, les garçons se partagent les quarts de nuit, 22h- 00h30, 00h30-03h00, 03h00-05h30, 05h30-08h00 ; ils vont tourner pendant toute la traversée. Magnifique clair de Lune à partir de 11h du soir ».

Premier pépin le premier jour: le charriot de barre d'écoute pète! Pas grave.

Ben: rester présentable en toutes circonstances 

Baptiste sous la douche; l'eau ne manque pas.

Mercredi 31 janvier, distance Martinique 1783 milles. « Belle progression hier vers Madinina, l'île aux fleurs ! La brise se maintient toujours à l'ENE et devrait tourner plein Est dans quelques jours ; nous sommes toujours au grand large et envisageons de tangonner le génois en ciseaux dans la journée, allure que nous pourrions peut-être garder jusqu'à notre arrivée. Nous sommes désormais installés dans le régime de traversée, toilette, repas, siestes, lecture, conversations animées, jeux de carte. La lune est au dernier quartier et éclaire les quarts pendant la deuxième partie de la nuit. Les menus sont toujours de grande qualité (merci Catherine pour l’approvisionnement !), nous avons terminé hier le thon acheté à Mindelo et les lignes sont désormais à l'eau. L'éolienne nous donne un peu de souci et semble ne plus fonctionner et les panneaux solaires n'équilibrent pas tout à fait le consommation d’électricité ; nous allons probablement être obligés de faire tourner le moteur 1h par jour pour recharger.



Tiens bon la barre et tiens bon le vent!

Jeudi 1 février, distance Martinique 1654 milles. « Aujourd'hui, nous célébrons l'anniversaire de Baptiste : 44 ans, un beau bébé ! Pour fêter l'événement, Baptiste a failli remonter un joli thon ce matin mais, pris de compassion pour la pauvre bête, il l'a laissée repartir à 10 m du bord. Batiste est un doux, un ami des animaux... ce ne sont pas les premières qualités demandées à un pêcheur et ce n'est pas ainsi que nous remplirons nos assiettes ! La prochaine fois, nous le stimulerons davantage au moment de la remontée du poisson pour qu'il ne se laisse pas attendrir. A propos d'attendrissement, Benjamin a une tendre pensée pour son petit Marius qui passe sur le billard aujourd'hui, il lui fait un gros bisou et tout l’équipage l'accompagne. L'alizé est toujours bien établi ; depuis hier à midi nous sommes plein vent arrière voiles en ciseaux. Emmanuel nous annonce une molle pour samedi et dimanche et une reprise du vent lundi. Nous faisons donc une route un peu plus Sud pour bien rester dans le flux de l'alizé. Toujours des petits soucis de charge ; les panneaux solaires n'équilibrent pas la consommation d'électricité de la journée et nous coupons le frigo la nuit pour rester confortables. Hier soir, moteur pendant 1h30 pour recharger ; le moteur consomme énormément d'huile, heureusement nous avons une bonne réserve pour assurer la traversée. Rien d'alarmant donc, tout va bien ».

La première pêche, un petit thon.



Vendredi 2 février, distance Martinique 1528 milles. « Merci beaucoup pour les nouvelles transmises par Emmanuel, Baptiste était particulièrement touché du message de sa Môôôman ! Belle journée pour nous en dépit des petits emmerdements qui font le charme de la vie en mer... tant que le soupe est bonne ! L'alizé commence à faiblir un peu et annonce la molle de deux jours qui vient vers nous. Nous maintenons tout de même une moyenne d'un peu plus de 5 nœuds ; donc tout va bien mais il est un peu tôt pour parler de la date d'arrivée, demain nous aurons parcouru le tiers du chemin. Nous avons empanné ce matin et faisons une route un peu plus Sud au 245° grand-voile et génois tangonné bâbord amure. Côté emmerdements maintenant, nous sommes assez bien servis : en mettant le moteur hier soir pour recharger avant le nuit, nous avons eu une alarme de pression d'huile au bout de 45 mns, 3 litres d'huile en trois quarts d'heure ! Le moteur est vraiment malade et il faudra vraiment regarder la question de près à la Martinique. Du coup le rythme de la vie à bord a changé par économie de l’électricité : le pilote est désormais sur off et nous nous succédons à la barre, "à l'ancienne", le frigo est économisé un maximum, l'écran de la navigation est allumé seulement quand on en a besoin. A part cela, Madame la Marquise, tout va très bien, tout va très bien ! »

Belle (mais petite) prise de Xavier: espèce non identifiée....

.... mais dégustée immédiatement en "poisson cru"


Dominique et Baptiste

Samedi 3 février, distance Martinique 1433 milles. « Ça-y-est, nous sommes entrés dans la molle depuis hier soir mais nous arrivons à tenir une vitesse moyenne de 4 nœuds, toujours plein vent arrière en ciseaux. Nous atteignons aujourd'hui le tiers de la route, ce qui devrait permettre une arrivée au Marin vers le 14 février si la brise reprend lundi et les jours suivants comme promis. Nous avons changé l'heure du bord ce matin pour passer en TU-1 afin de recaler notre quotidien sur le Soleil ; nous restons bien sûr calés sur 12h TU pour nos vacations radio. Nous naviguons désormais en mode économique (pilote automatique, frigo et écrans éteints), à l'ancienne avec quelqu'un à la barre en permanence ; nous arrivons ainsi à maintenir un niveau de batteries correct. Nous avons fait hier soir un dernier essai de recharge avec le moteur et avons compris que ce dernier était désormais complétement HS. Il démarre très bien et tourne rond mais en un peu plus d'une demi-heure de fonctionnement, nouvelle alarme d’huile : 2,5 litres d'huile bouffés en 1/2 heure ! Nous ne l'utiliserons qu'à l'arrivée, pour l'accostage définitif d'Alfred. Nous avons pris un beau thon (2,5 kg) hier soir au coucher du soleil, juste au moment de la préparation du repas. Du coup, le menu du soir a changé pour un délicieux poisson cru à la polynésienne ! En l'absence de frigo, la deuxième moitié du thon va être cuisinée pour le déjeuner à midi... en attendant la prochaine prise »

Grand ménage à bord



Douche quotidienne

Dimanche 4 février, distance Martinique 1343 milles. « Toujours la molle mais en maintenant une vitesse honorable de 4 nœuds en moyenne. Nous sommes pratiquement à la latitude du Sud de la Martinique (14°20'N) le vent semble se stabiliser à l'E en nous faisons désormais route directe au 270°. Ce matin, les garçons ont entrepris une propreté complète d'Alfred (tri et nettoyage du frigo, nettoyage des sols et du cockpit). Les réserves fraîches du frigo sont terminées, il reste encore pas mal de beurre non entamé et du jambon fumé sous cellophane qui devraient bien se conserver jusqu'à notre arrivée malgré l'absence de frigo. Nous terminons le pain aujourd'hui, à partir de demain, le boulanger va se mettre au travail. Bref, nous naviguons toujours en mode économique en préservant les batteries qui arrivent à peu près à se recharger dans la journée. Les journées se passent assez vite et bien occupées ; entre 6 heures de barre par jour, la cuisine, la vaisselle, la lecture, la belote, la remontée régulière des lignes (toujours rien depuis le thon d'avant-hier), nous ne voyons pas passer la journée. Je me dis que c'est finalement une bonne chose de ne plus avoir de pilote ; depuis que les garçons se partagent les tours de barre, ils s'impliquent encore plus dans notre progression. Normalement, l'alizé devrait se réveiller dans la matinée de demain et nous permettre une meilleure vitesse. Moral au top ! grosses bises à tous ! »

Benjamin, Baptiste, Xavier


Adrien fait une droite de hauteur: découvrez-vous, nous somme à Saint Pierre de Rome.

Une belle daurade coryphène; Benjamin, Xavier, Baptiste

Lundi 5 février, distance Martinique 1261 milles. « Longue après-midi de pétole hier, à peine plus de 2 nœuds de moyenne entre midi et minuit ! Heureusement, pendant le quart de Xavier vers 2 heures du matin, l'alizé a commencé à frémir à nouveau ; il est désormais bien établi et nous avançons maintenant à près de 6 nœuds en route directe vers la Martinique. Hier, après la toilette du bateau et un bon taboulé, petit cours d'astronomie nautique dans le cockpit avec apprentissage de la manipulation du sextant : gros succès ! Malheureusement, nous n'avons pas à bord d'éphémérides nautiques et nous ne pouvons pas pousser l'exercice jusqu'au bout avec tracé de la droite de hauteur et du point astro. Mais l'essentiel du principe du calcul et de la mesure est acquis... nous entrons dans la filiation de Colomb, Magellan, Cook et La Pérouse ! Petite inquiétude ce matin en voyant le ciel complétement couvert : arriverons-nous à recharger les batteries aujourd’hui ? Régulièrement, depuis que nous ne pouvons plus avoir recours au moteur pour recharger, nous dépendons totalement de l'ensoleillement de la journée. En moyenne, nous terminons la nuit avec 60% de charge et, en fin de journée, quand le soleil a bien donné, nous atteignons à peine 67-68% le soir... Heureusement ce matin vers 10h, le ciel s'est dégagé et les batteries refont leur appoint d'énergie... ‘pervou qué ça doure’.... »


Baptiste: la cuisine est un art...

... la dégustation également


Ambiance...

...ambiance

Mardi 6 février, distance Martinique 1157 milles. « Après une promesse de fraîchissement du vent dans le matinée d'hier, l'alizé a de nouveau un peu molli dans l'après-midi puis revient bien depuis le lever du jour ce matin. Pendant les molles, la mer demeure un peu agitée, pas beaucoup mais suffisamment pour réclamer beaucoup d'attention à l'homme de barre pour ne pas nous mettre sous la fausse panne. Dès que le vent se renforce un peu, l'exercice est plus facile pour se maintenir en ligne droite. Le vent reste toujours un peu ENE, ce qui nous contraint à un cap au 250°, à 25° plus sud que la route directe. Emmanuel nous annonce une nouvelle molle, courte toutefois, pour la journée de vendredi. Bref, nous n'allons pas aussi vite que nous l'espérions et la perspective d'une arrivée le 14 est plus hypothétique... ce sera plutôt le 15... La partie de whist d'hier soir, juste avant l'apéro, a été interrompue par une magnifique prise : une superbe daurade coryphène de 4kg, presque 1 mètre de long ! Du coup, fin de partie et mise en place du rituel obligatoire : poisson cru tahitien au dîner et le reste pour le déjeuner d’aujourd’hui !! Après cette péripétie, reprise de la routine en commençant par le ti'punch du soir ! Les quarts de nuit se succèdent avec de plus en plus d’aisance ; l'homme de barre passe ses 2h1/2 de quart seul à l'arrière (avec gilet bien sûr et attaché au pataras, cela dit pour rassurer les mamans...). Aujourd'hui, premiers pains faits à bord, confectionnés par Benjamin ; ils sont en train de lever avant de passer au four. »

Belle prise! Une rasade de rhum dans les branchies et la bête est calmée!

On s'y est mis à quatre! 

Découpage de la daurade: deux repas.

Conversation en VHF avec un cargo en route vers la Chine... un mois de voyage


Mercredi 7 février, distance Martinique 1021 milles. « Ça y est ! Nous avons dépassé la moitié du chemin ce matin au petit jour (2080milles/2) et nous devrions franchir la frontière des 1000 milles restant tout à l'heure, pendant notre déjeuner. La brise est bonne, les lignes sont à l’eau, cap sur les Antilles. Nous avons empanné hier vers 18h, un peu trop tard sans doute, et depuis nous faisons route directe vers la Martinique. L’alizé depuis ce matin a un peu faibli mais nous permet de maintenir une vitesse correcte. Nous attendons de passer la molle annoncée par Emmanuel pour vendredi pour avoir une idée de notre jour d'arrivée, mais pas d'inquiétude à ce sujet. La fournée du boulanger hier était savoureuse mais les pains n'ont pas assez levé ; la levure (achetée aux Bijagos il y a un an) a peut-être perdu sa vigueur, le boulanger va mettre double ration de levure pour le pain d'aujourd'hui. Les petits pépins matériels commencent à alimenter la 'to-do-list' du Marin : à part le moteur, remise en état de la barre d'écoute de GV et changement des roulements de l'enrouleur de génois, révision de l'éolienne; ces petits soucis n'affectent en rien le moral solide de l'équipage. »



Jeudi 8 février, distance Martinique 914 milles. « Alfred a cru sentir quelques effluves de l'écurie et commence à s’ébrouer ! Mais cette dernière est encore un peu lointaine car une colline se dresse petit à petit devant nous : une molle qui se met en travers de notre route entre vendredi et samedi. Pour contourner cette colline par le sud, nous faisons une route un peu plus à gauche de la route directe, ce qui nous amènera samedi à presque 150 milles au sud de la latitude de la Martinique. Après la colline, Alfred repartira au galop, droit sur l’écurie ! Premier événement marquant de la journée d’hier : peu de temps avant le déjeuner, nos deux lignes se raidissent en même temps : nous remontons la première, une belle daurade de 90cm-4kg, la taille standard. Nous nous intéressons alors à la deuxième ligne, celle montée sur la canne : ça tire fort ! très fort !!! Apparemment une daurade coryphène mâle (front fortement bombé) d'une taille bien supérieure à ce qui n’a jamais été pêché sur Alfred... Peine perdue, alors que, très excités nous le voyons tout prêt de notre arrière prêt à être remonté, imaginant déjà la photo des trophées du siècle, la ligne casse... Nous nous consolons vite en changeant immédiatement le menu du déjeuner et celui du dîner. Autre péripétie de la chronique quotidienne, ce matin vers 5 heures notre électronique s'est mise 'out'. Après un soupçon sur des problèmes de branchement et de connexion, nous comprenons que cela vient du niveau des batteries trop faibles en fin de nuit ; il faut éviter que la charge descende en deçà des 60%. Un petit coup de charge au moteur a vite rétabli les choses. »

Le rythme de traversée s'est bien installé, la douche...

... l'épluche....

.... la barre....

.... et la méditation du soir

Vendredi 9 février, distance Martinique 799 milles. « Nous avons empanné hier en début d'après-midi et faisons désormais route directe vers la Martinique. La vitesse devrait être un peu ralentie aujourd'hui avant de retrouver samedi un alizé stable qui devrait nous propulser jusqu'à l'arrivée. La molle nous a touchés hier soir pendant la partie de belote avant le dîner, mais nous arrivons à maintenir une vitesse à peu près correcte ; vraisemblablement, après deux journées à moins de 120 milles aujourd'hui et demain, nous devrions faire de belles journées ensuite et arriver en temps voulu, c'est-à-dire le 15. L'option de faire une route plus sud pendant deux jours nous a permis d'éviter le centre de la molle que nous abordons ; c'était donc une bonne option. Tout va bien à bord, moral au beau fixe dans la joie de vous retrouver bientôt ! »

Visite d'Alfred: le carré, ...

.... les cabine avant, trés encombrées de matériel....

... la cave du capitaine dont Adrien a trouvé la clé, catastrophe!....

... et la cambuse

Samedi 10 février, distance Martinique 682 milles. « Ça y est ! la molle est passée ! cap sur la Martinique au triple galop ! Nous nous sommes extraits de la molle hier en début de soirée et depuis ce matin l'alizé augmente, nous avançons à plus de sept nœuds et commençons à spéculer sur l’heure d'arrivée ; au train actuel, nous pouvons y être le 14 dans la journée, nous imaginons un mouillage à Sainte Anne (+ resto) avant d'aller au Marin le15 au matin et contacter immédiatement le mécano. En principe, l'alizé, actuellement 15-20 nds, devrait se renforcer à 20-25 à partir de ce soir puis pour les deux jours suivants. Nous devrions pouvoir rester 'tout dessus', GV et génois tangonné en ciseaux tribord amure, et si le gréement ne moufette pas, c'est une arrivée à la Martinique en fonçant 'comme un pet de lapin sur une toile cirée' comme disait papa ! Aujourd'hui, anniversaire de Xavier sous les tropiques, le vent va l'aider à souffler ses 34 bougies ! Catherine, Emmanuel étant au ski, peut-être peux-tu transmettre ce message à tous nos abonnés ? Merci. Emmanuel, nous avons désormais une bonne couverture météo jusqu'à l'arrivée, il n'est donc plus utile que tu nous renseignes quotidiennement comme tu le fais depuis le départ ; tout l'équipage te remercie de ton précieux routage et de tes judicieux conseils pour contourner les deux zones de vent faible pendant cette traversée.

En PS ce petit mot de Joseph à son papa au sujet de la grosse daurade que nous n'avons pu remonter à bord avant-hier ! « bonjour papa que j’aime, j’ai hâte de te revoir. Je lis l’histoire de de Gaulle en ce moment et je me demande si ton poisson qui est retombé à l’eau n’a pas dit 'poisson attaqué / poisson martyrisé / poisson libéré !!!' Bisous papa »

Alfred à l'heure espagnole: la "tortilla" cuisinée par Baptiste et Xavier 

Autre sommet gastronomique de cette transat: L'œuf mayonnaise, le triomphe d'Adrien,
 "chevalier de l'ASOM" (Association de Sauvegarde de l'Oeuf Mayonnaise)

Anniversaire en mer, 44 et 34 bougies....

... soufflées sur un gâteau au chocolat!

Dimanche 11 février, distance Martinique 552 milles. Le vent a un peu faibli dans l'après-midi d'hier mais est bien revenu vers 3 heures ce matin, du coup notre rêve de resto mercredi soir à Sainte Anne s'est envolé ; ce sera plutôt une arrivée au Marin jeudi 15 matin. Nous avons détangonné hier soir pour faire une route au grand largue un peu plus nord que la route directe ; notre intention est de rester sous cette allure jusqu'à la latitude de la Martinique (1° de latitude à gagner vers le Nord) puis de nous remettre plein vent arrière en ciseaux pour le dernier bord. L'ambiance à bord est épatante, les bouquins passent de main en main, lectures interrompues par les siestes, les parties de whist et belote, les repas. Côté gréement tout va bien à part l'enrouleur de génois qui ne fonctionne pas bien (révision nécessaire au Marin). Côté bouffe, nous arrivons au bout des légumes frais mais les garçons ont du génie pour trouver des salades fraîches et variées en piochant dans les boîtes de conserve ; la qualité du pain s'améliore depuis que nous avons changé de levure. Le quart de vin aux repas est garanti jusqu'à l'arrivée donc tout va bien ! »

Déjà un bon parcours, mais ce n'est pas fini..

La fournée du boulanger

Le ti 'punch du soir, les Antilles ne sont plus très loin.

Lundi 12 février, distance Martinique 399 milles. « L'alizé bien soutenu se maintient et se maintiendra très probablement jusqu'à notre arrivée ; notre foulée s'est donc bien allongée et, sauf pépin, Alfred gardera son souffle jusqu'à la ligne d'arrivée, probablement pendant la nuit du 14 au 15. Finalement, nous sommes revenus plein vent arrière hier après-midi car le vent devenait un peu moins nord ; il se maintient proche du plein Est, ce qui nous permet de faire route au 270° sur la Barbade. Le bateau est un peu volage dans une mer formée qui nous vient de l'arrière et une houle croisée assez forte (4-5m) qui vient du NE ; l'homme de barre doit être très vigilant pour maintenir le bateau dans l'axe dans ces conditions, éviter les auloffées qui font souffrir le génois, mais s'interdire les abattées et l'empannage qui pourrait faire de la casse... mais les garçons, qui auront chacun 100 heures de barre dans les bras à l'arrivée, sont devenus très adroits et le bateau se coule entre les bosses comme sur une piste de ski !! »

La lecture imposée sur Alfred: l'histoire de la Méduse

Un  petit coup de fil à nos chéries


Mardi 13 février, distance Martinique 236 milles. « Ça sent l'écurie ! Nous sommes dans un flux permanent et bien soutenu d'alizé de 25 nœuds qui nous permet de tenir une belle moyenne journalière de 7 nœuds avec des pointes à 9 (restons modestes, on n'est pas tout à fait au niveau de Caudrelier sur 'Edmond de Rothschild' avec ses 770 milles par jour....). Nous faisons une route un peu plus sud que la route directe et nous devrons détangonner ce soir pour remonter vers la Martinique. Petit pépin vers 5h cette nuit : le hale-bas de tangon a cassé au niveau de l'étrave à cause du ragage contre la verge de l'ancre (que nous aurions dû rentrer pendant la traversée) ; pépin vite réparé, il faudra que je réorganise le passage du hale-bas sur l'avant. La nuit prochaine nous passons au large de la Barbade que nous verrons encore peut-être au petit jour ; quels bons souvenirs avec Pierre et Louis de notre 1er passage en 2012, une île antillaise noire mais 'so british!' ! »



Mercredi 14 février, distance Martinique 82 milles. Bonne Saint Valentin à toutes ! Nous sommes tous très amoureux !! Nous y sommes presque, la côte n'est plus qu'à 80 milles, une paille !! A bord, nous vivons à l'heure TU-3, 4 heures de décalage par rapport à Paris mais encore une heure par rapport aux Antilles. Nous devrions apercevoir la côte à la fin du jour et assister à un beau coucher de soleil sur Sainte Lucie et la Martinique. Une belle traversée de 2180 milles avec un départ superbe, deux journées très rapides avec 25 nœuds de vent, et une arrivée en fanfare depuis trois jours dans un alizé très soutenu ; entre les deux, passage de deux molles où Alfred avançait paresseusement, mettant quelques doutes dans l'esprit des équipiers sur l'échéance de l'arrivée, dans l'incapacité où nous étions de mettre un peu de moteur pour fouetter la bête.... mais Alfred a compris notre désarroi (Eole aussi)... et voilà, nous y sommes presque ! Au bout du compte, 5,5 nœuds de moyenne sur la route suivie, ce qui n'est pas si mal, un bateau en bon état et un équipage heureux ! »



Nous sommes arrivés enfin pendant la nuit du 14 au 15 février vers 2 heures du matin (heure de la Martinique), derniers bords sereins à la voile pour mouiller à l’abri à 200 mètre sous le vent de la Pointe Dunkerque, au sud de Sainte Anne. La nuit se prolonge par un dernier ti’punch dans le cockpit, l’équipage heureux, un peu fatigué mais pas trop pressé de se coucher… Bonne baignade le lendemain matin au mouillage avant de repartir en louvoyant sous grand-voile et trinquette jusqu’au Marin où nous nous amarrons à un ponton juste avant d’aller déjeuner dans un bistrot : quel délice, cette première gorgée de bière fraîche après 15 jours sans frigo ! L’après-midi se passe d’abord paresseusement dans la forte chaleur puis une toilette complète d’Alfred tandis que Xavier va accueillir à l’aéroport Marta puis Catherine qui arrivent de Paris. La soirée se termine par un délicieux dîner antillais offert par nos équipiers dans un bon restaurant de la Marina.

Le mouillage de l'arrivée, à l'abri de la Pointe Dunkerque près de Sainte Anne

Première baignade, le lendemain de l'arrivée



Dernier bord vers le Marin

Journée d’incertitude pour cette fin de croisière au moment où notre équipage nous quitte ; un mécanicien vient ausculter notre moteur le 16 au matin et son verdict est sans appel : le moteur d’Alfred est mort, probablement le bloc fendu, et il faut le remplacer. Le bateau est sans doute immobilisé au Marin et le programme de croisière de Clélia qui rejoint ce soir son Benjamin risque d’en être chamboulé. Nous serrons les pouces pour que la suite de notre croisière puisse reprendre vite le cours prévu après cette péripétie un peu désagréable…

Premier contact avec la Martinique: baignade à la plage du Diamant

Benjamin et Clélia en vadrouille sur l'île de La Dominique 

Dernières nouvelles le 21 février: le diagnostic définitif est tombé le lendemain de notre arrivée: le moteur est mort, le bloc est fendu... de profundis!!! Par chance, un nouveau moteur est disponible chez Mécanique Plaisance, nous allons faire un échange standard. Alfred est immobilisé au Marin  jusqu'au 28 février. Ben et Clélia changent leur programme, ils quittent Alfred après deux jours à la Martinique pour une balade en amoureux à Dominique puis la Guadeloupe.