mardi 24 novembre 2015

De Sao Vicente à Fernando de Noronha



Ciel lourd au coucher du Soleil dans le Pot-au-noir

Le Pot-au-Noir, lieu de désespérance des navigateurs, hanté par le ‘’Hollandais Volant’’ : cette étape était une première pour Alfred, avec sa promesse d’épreuves au passage de la ZIC, le franchissement des zones de calme parsemées d’orages tropicaux ultra-violents avec rafales de vent et foudre menaçantes, puis la délivrance après le passage de l’Equateur et l’arrivée, enfin dans le flux des alizés du Sud-Est….
Passage d'un grain dans la ZIC

Il n’en aura rien été : pratiquement pas de zone de calme, quelques orages, énormes il est vrai, aperçus au loin, deux ou trois grains de forte pluie mais avec des vents ne dépassant pas 30 nœuds : au moment de notre passage, la ZIC (Zone Intertropicale de Convergence) était quasiment inexistante et nous sommes passés presque sans interruption, en quelques heures, du régime des Alizés de NE de l’Atlantique Nord, à celui des Alizés de SE que nous avons trouvés dès la latitude 4°Nord.


Des conditions exceptionnelles pour cette étape qui aurait pu être difficile où Alfred a avalé les 1400 milles de la route à 5,6 nœuds de moyenne….  Pot-au-noir ??... Pas vu !!!   Rien à voir donc avec la traversée éprouvante d’Emmanuel et Caroline sur Astrée en 2002 dont nous avons relu la relation en suivant, 13 ans après eux, à peu près la même route.

Mais revenons plus en détail sur les péripéties de cette traversée.

Port de pêche de Mindelo

Pêcheur de Sao Vicente au ramandage de son filet

Mercredi 11 Novembre, les deux équipages, l’équipage débarquant de l’étape Canaries-Cap Vert et le nouvel équipage, se séparaient après un dîner dans un resto du port de Mindelo. Le lendemain, tandis que Mathilde, Jean, Damien et Grégoire étaient partis pour leur randonnée sur l’île voisine de Santo Antão, les nouveaux équipiers s’affairaient à  l’embarquement des fruits et légumes et à l’achat de leurres pour la pêche.

Colloque dans une rue de Mindelo; Dominique, Daniel et Jean-François

Catherine marchande deux régimes de bananes de 20 kilos chacun

Nos nouveaux équipiers sont aguerris et ont tous participé au dernier voyage d’Alfred en 2012 : Gérard  de la Cochetière de Madère au Cap Vert, Daniel Laurent de Cuba aux Bermudes via les Bahamas, François Mouly et Jean-François Corbineau des Açores à la Trinité. Grosse tâche que celle de caser à bord dans la cambuse un chargement conséquent en raison de la probable inexistence de l’approvisionnement à Fernando de Noronha : 15 kg de tomates, 45 kg de régimes de bananes, 10 kg de concombres, 10 kg de choux,12 kg de papayes sans compter oignons, pommes, poires, oranges, 200 litres d’eau minérale en plus des 450 litres des réservoirs d’eau douce et évidemment les indispensables citrons verts en quantité pour les prises que nous sortirons de la mer (et accessoirement pour les ti’punch du soir). Les pleins de gasoil sont faits avant d’appareiller enfin vers 17 heures pour cette transat.

Marché aux légumes de Mindelo

Non, ce ne sont pas les éboueurs, mais la corvée de vivres

Chargement des vivres sur Alfred

Vingt-quatre heures et 120 milles après, nous quittons définitivement les îles du Cap Vert en dépassant les îles du Sud de l’archipel, entre Fogo  et Brava ; le temps est brumeux et le sommet du pic de Fogo (2829 mètres, dernière éruption en 1995)  nous apparaît au-dessus de la brume à 18 milles. Au passage, Gérard nous sort deux petits thons de 1,5 kg qui nous feront un bon dîner de début de traversée.

Belle prise de deux thons par Gérard qui les transforme aussitôt en sashimi


Nettoyage quotidien de la cambuse et tri des légumes

La route directe depuis Fogo (15°N ; 24°W) vers Fernando de Noronha (3°50’S ; 32°25’W), 1300 milles au 200°, risque de nous mettre en difficulté car, une fois la ZIC passée, les alizés du SE peuvent être trop pointus ; la bonne tactique, qui allonge le trajet d’une centaine de milles, consiste donc à suivre une route au Sud sur le méridien de départ jusqu’à atteindre les alizés du SE et abattre sur Fernando à une allure plus confortable après avoir dépassé par l’Est les rochers Saint Pierre et Saint Paul situés proche de l’équateur (1°N ; 29°,5W). Nous mettons donc cap vers un point baptisé PP (5°N ; 25°W) et resterons sur cette route en attendant l’évolution du vent : c’est ainsi que Pierre et Paul nous auront accompagnés durant 8 jours….

Dorade coryphène de 4 kilos! Bravo Jean-François

Aussitôt découpée pour le dîner

Le repas du soir dans le roulis: avec les mains mais aussi avec les pieds

Les cinq premiers jours se passent ainsi route en moyenne au Sud, avec un temps assez couvert et un régime d’alizés variant du NNE au NE, force 3-4 faiblissant parfois ; nous suivons ces changements de direction en alternant les allures vent arrière génois tangonné et grand largue bâbord amures.

Manoeuvre du spi, Jean-François et Dominique

La plus belle prise de la traversée: 6 kilos, un mètre de long


Le 15 novembre, au troisième jour de mer, nous célébrons le jour du Seigneur par une longue après-midi de spi ; Alfred frétille à plus de 7 nœuds et pour clore cette belle journée Jean-François sort de l’eau une superbe dorade coryphène de 3,5 kg qui nous fera deux repas. Le spi est amené le soir et rangé contre le balcon arrière, prêt à être renvoyé.

François, génération "Y"

Jean-François, génération "Cool, Raoul!"

Gérard,la "fisherman attitude", patient et sûr de sa bonne étoile

Dans la nuit qui suit, le récepteur GPS principal (celui qui donne le point à l’ordinateur) manifeste une instabilité jamais observée, avec un niveau de signal très faible, et cessant d’afficher le point plusieurs heures durant… Rien de grave, nous avons deux autres moyens d’avoir un point GPS, le petit récepteur portatif ‘’Magellan’’ et l’IPAD, mais nous ne comprenons pas pourquoi le récepteur GPS principal fonctionne de façon aléatoire alors que les deux autres récepteurs, beaucoup plus simples, marchent correctement ??? Nous ne comprendrons que 3 jours plus tard à mi-parcours (Mindelo et Fernando à 700 milles), le mercredi 18 novembre, après avoir épluché de long en large la notice Furuno et refait les connexions du circuit d’antenne : l’antenne GPS, placée dans la jupe arrière d’Alfred, était masquée par le spinnaker que nous avions rangé juste au-dessus et qui perturbait la réception depuis trois jours… l’expérience du marin est le résultat de l’accumulation de ses  bêtises ! Gérard  célèbre à sa façon  la « réparation » du GPS par une magnifique prise : une dorade de 6 kilos mesurant 1mètre (homologation Catherine). 

Belle prise de 6 kilos, 1m de long


François
Daniel

Gérard, génération tchatche

Daniel prend sa douche quotidienne

Dans la nuit qui suit, le temps change : après quelques heures de pétole et deux forts grains de pluie tropicale, le vent mollissant passe à l’Est et se renforce à force 4 en passant au SE ; il ne changera plus de direction jusqu’à l’arrivée. Nous sommes alors à 250 milles au NE des rochers São Pedro e São Paulo. Nous commençons à infléchir franchement la route vers l’Ouest en laissant les deux rochers  à 130 milles sur notre droite. 

Salon de lecture d'Alfred.... Silence....
Stage de vaisselle pour Gérard et Jean-François qui ont obtenu leur certificat avec brio... Marie-Laure et Anne vont être contentes!!!

L’alizé s’établit ensuite jusqu’à un bon force 5 et Alfred file à plus de 7 nœuds vers Fernando de Noronha ; le vent se renforce parfois sous les grains jusqu’à force 6-7, que nous saluons en prenant un ris dans la GV mais en gardant le génois : Alfred va vite et tient bon jusqu’à la nuit du 20 novembre à minuit où la pièce d’attache du point de drisse de génois casse. Le génois est remplacé par la trinquette, ce qui ralentit  un peu l’allure, mais nous garderons jusqu’à l’arrivée la moyenne de 145 milles par jour, soit six nœuds. L’équateur est franchi le soir même à 22h45 (longitude 28°10’W), mais Neptune et Amphitrite étant des couche-tôt, le baptême des quatre néophytes (Catherine, Daniel, François et Jean-François) est différé au dîner du lendemain : le passage de la Ligne est célébré par un très bon foie gras d’oie arrosé d’un excellent champagne.
Catherine, Daniel, François et Dominique, les yeux fixés sur le récepteur GPS au passage de la Ligne
Passage de l'Equateur sur le récepteur GPS...

... et sur Maxsea

Passage de la Ligne célébré au champagne!

En goguette dans la guinguette

 La lune, qui a dépassé le premier quartier, illumine nos nuits et nous arrivons à Fernando de Noronha le lundi 23 novembre à 6 heures après dix jours et demi de mer.

Arrivée à Fernando de Noronha le 23 novembre au petit jour
Le Morro do Pico
Nous restons trois jours à Fernando de Noronha et mettrons le cap sur Salvador de Bahia (700 milles) le mercredi 25 novembre dans la soirée.

Catherine, le Pico et Alfred à contre jour

3 commentaires:

  1. Un immense bravo à l'équipage de choc ! Ces prises de pêches font rêver les parisiens que nous sommes et changent du rayon poissonerie de nos supermarchés métropolitains ! Profitez en à fond !

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  2. vous me ferez rêver encore longtemps! passage de l'équateur, des pêches magnifiques, un équipage masculin pas mal encore pour son âge, et une déesse à admirer: Catherine!!!
    sabine

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  3. mais quelle pêche ! au sens propre et figuré, quelle équipe !
    on vous suit depuis notre macadam et vous alimentez nos rêves...BON VENT
    Isabeau

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